Parenthese - Nigel mountain guide

Parenthèse : Nigel, guide de haute montagne.   (English below)

Sydney a dit : « Nigel, tu dois t’entraîner à écrire, maintenant que je t’ai appris ». C’est dur. Je ne sais pas quoi écrire. Les mots, c’est mieux quand c’est ceux des autres. Eux, ils savent comment on les met dans le bon ordre. Comme je ne sais pas inventer des histoires, je vais raconter des choses que je connais. Sur moi, sur ma vie.

Mon nom c’est Nigel Kahlua. C’est la première chose que j’ai su écrire. Nigel Kahlua. Je l’écris bien maintenant. Nigel, c’est mon prénom. C’est comme ça que les gens m’appellent. Kahlua, c’est le nom de ma famille. Mes parents s’appelaient comme ça. Avant. Quand j’avais des parents. Il y a longtemps. Mon papa était un monsieur, et ma maman était une Beeguh. Je sais, c’est bizarre. Mais c’est comme ça. Ils s’aimaient très fort alors je suis né. Et puis j’ai grandi dans la montagne. Et ils sont morts. La montagne les a pris. J’ai décidé que c’était mal. Alors j’ai voulu aider les gens à traverser la montagne sans mourir. J’ai appris tout seul. Et comme les gens n’aiment pas mourir, j’ai trouvé du travail. J’ai porté des messages aussi. Du coup j’ai rencontré des gens qui parlaient des langues bizarres. Comme je n’ai pas besoin de beaucoup de mots j’apprend facilement les mots des autres. J’ai appris des mots de langues humaines. Plus que les doigts d’une main. Les langues, pas les mots. Il faut beaucoup de mains pour compter les mots, j’en ai pas assez.

Donc j’ai fait le guide et le messager dans la montagne. J’ai appris à lire mon chemin dans les étoiles et sur le soleil. Je connais la neige et la pierre, un peu le sable aussi. Mais pas bien la forêt. C’est Willka qui connaît la forêt. C’est un endroit avec des arbres. Beaucoup. Plus que dans la montagne. Plus rapprochés aussi.

Willka, c’est mon ami. J’en ai pas beaucoup, parce que je sais pas les mots pour faire des amis. Willka, il peut voler dans le ciel et il sait se bagarrer. Pourtant il est tout petit. Mais il crie très fort. Surtout quand il se dispute avec Sydney. Sydney, c’est une femelle. Je savais pas au début, parce que je connais pas trop ça. Mais Willka m’a expliqué. J’aime bien Sydney. Elle est jolie pour les yeux. Et surtout, elle me donne à manger. Souvent. Assez. C’est bien. Elle m’a aidé à apprendre comment faire du bon manger avec plusieurs choses dedans. Elle me donne les choses, et moi je les mets ensemble et je les fais cuire. J’ai appris avec un livre. C’est bien des fois les livres. Quand il y a des images. Sinon c’est trop dur, je préfère quand Sydney les raconte. J’aime bien sa voix. C’est comme ma maman, mais différent.

Avec Sydney et Willka, on a le même esprit-guide. C’est lui qui nous aide à savoir quoi faire dans la vie. Il m’a dit d’aller voir Sydney quand je suis arrivé au camp. Alors quand elle a demandé pour un assistant, je savais pas ce que c’était, mais j’y suis allé. Elle a dit oui. Depuis, je vis dans sa maison. Elle l’a creusée toute seule. Elle sait creuser, elle aussi. Comme moi. Même si elle est plus petite, elle a de bonnes pattes. Comme elle a une maison et à manger, elle pourrait rester chez elle. Mais non. Elle reste jamais chez elle. Elle veut toujours partir trouver des choses. J’aime bien marcher dans la nature avec elle. Mais des fois c’est dangereux, et on se fait mal. C’est un peu nul. C’est pour ça que Boursin m’apprend comment on soigne les gens.

C’est nul, d’écrire. Les mots viennent pas. J’arrive pas à dire ce qu’il y a dans ma tête. Quand je relis on dirait que c’est quelqu’un d’idiot qui a écrit. Pas comme dans les vrais livres. Mais je suis pas idiot moi. Je sais juste pas dire les choses. Heureusement, Sydney et Willka savent. J’ai confiance en eux. Et ils ont confiance en moi. Willka appelle ça une famille. Un peu, oui. Mais Sydney n’est pas ma maman. Elle me soigne des fois, elle me nourrit beaucoup, mais elle n’est pas ma maman. Je sais pas trop ce qu’elle est en fait. Pour l’instant, ma « patronne ». Mon amie aussi. J’ai pas le mot pour dire. Ça sert à rien de toute façon. Sydney elle comprend sans parler. C’est bien.

J’ai fait mon exercice de l’écriture. Je ferai voir à Willka. Il me dira si c’est bien ou pas. Je veux pas montrer à Sydney parce que j’ai écrit beaucoup sur elle. J’ai peur qu’elle soit en colère. On sait jamais quels mots on a le droit de dire. « Esprit Guide, pourquoi tu m’aides pas avec les mots ? » j’ai demandé dans ma tête un jour. Une voix m’a répondu : « Tu n’as pas besoin des mots pour être le plus fort et pour aider les autres ». D’accord. Je peux arrêter d’écrire maintenant ? Ça fait mal à la main.

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(English version)

Nigel, mountain guide.  

Sydney said, "Nigel, you have to train your hand, now that I've taught you how to write." It's hard. I do not know what to write. Words are better when they are used by others. They know how to put them in the right order. Since I do not know how to invent stories, I will tell things I know. About me, about my life.

My name is Nigel Kahlua. This is the first thing I have written. Nigel Kahlua. I write it now. Nigel, that's my first name. That's how people call me. Kahlua is the name of my family. My parents were called like that. Before. When I had parents. Long ago. My dad was a man, and my mother was a Beeguh. I know, it's weird. But it's like that. They loved each other much, so I was born. And then I grew up in the mountains. And they're dead. The mountain took them. I decided it was wrong. So I wanted to help people cross the mountain without dying. I learned all by myself. And as people do not like to die, I found work. I have carried messages too. So I met people who spoke forein languages. Since I do not need many words I easily learn the words of others. I have learned words from human languages. More than the fingers of one hand. Languages, not words. It takes a lot of hands to count words, I do not have enough hands.

So I was a guide and a messenger in the mountain. I learned to read the way in the stars and on the sun. People use maps. I don’t. I know of the snow and the stone, a little of th sand too. But not the forest. It is Willka who knows the forest. It is a place with trees. A lot of trees. More than in the mountains. Closer also.

Willka is my friend. I do not have many, because I do not know the words to make friends. Willka, he can fly in the sky and he knows how to fight. Yet he is very small. But he shouts loudly. Especially when he's arguing with Sydney. Sydney is a female. I did not know at first, because I do not know that much. But Willka explained to me. I like Sydney. She is pretty for the eyes. And above all, she gives me things to eat. Often and enough. It's good. She helped me learn how to make good food with several things in it. She gives me things, and I put them together and I cook them. I learned with a book. Books are good sometimes. When there are pictures in them. Otherwise it's too hard, I prefer when Sydney tells them. I like her voice. It's like my mom’s, but different.

With Sydney and Willka, we have the same guiding spirit. It is the one who helps us know what to do in life. He told me to go to Sydney when I got to the camp. So when she asked for an assistant, I did not know what it was, but I went to her. She said yes. Since then I have lived in her house. She dug it all by herself. She knows how to dig like me. Even if she is smaller, she has good paws. Since she has a home and food, she could stay at home. But no. She never stays at home. She always wants to go find things. I like walking in nature with her. But sometimes it's dangerous, and you get hurt. It is a little sad. That's why Boursin teaches me how to care for people and heal them.

It's bad, to write. The words do not come. I can not say what's in my head. When I reread it, it looks like it's a silly person who has written. Not like the real books. But I'm not stupid. I just can not say things right. Fortunately, Sydney and Willka know. I have faith in them. And they trust me. Willka calls it a family. That’s part true. But Sydney is not my mom. She looks after me sometimes, she feeds me a lot, but she's not my mom. I do not know what she is. For now, my "boss". My friend too. I do not have the word to say it. It does not matter anyway. Sydney understands without me speaking. It's good.

I did my writing exercise. I'll show it to Willka. He'll tell me if it's good or not. I do not want to show Sydney because I wrote a lot about her. I'm afraid she’ll get angry. I never know what words are allowed to say. "Guiding Spirit, why do you not help me with the words? " I asked in my head one day. A voice replied, "You do not need words to be strong and to help others." Okay. Can I stop writing now? It hurts my hand.